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C’est pourtant à cette période que le luthier Antonio de Torres (1817-1892), né à San Sebastian de Almeria, invente la meilleure guitare que l’on ait jamais conçue et construite. Son dessin simple et pur, aux proportions élégantes, permet de prendre la mesure de son génie au premier coup d’œil. Torres bouleverse la configuration allongée venue de l’époque baroque. Il donne à la guitare les formes que nous lui connaissons aujourd’hui. Il développe et perfectionne les sept barres qu’il installe sous la table, en lieu et place des 4 ou 5 barres transversales employées jusqu’alors. Il définit leurs proportions et leur position avec tant de perfection, que toutes les tentatives faites depuis pour améliorer ce schéma et ces cotes échouent, malgré l’intervention des technologies et des matériaux les plus sophistiqués. Pour démontrer l’importance de son travail sur la table d’harmonie, dont il est convaincu qu’elle est la pièce maîtresse de la guitare, il construit, en 1862, un instrument dont le fond et les éclisses sont en carton. Conservée au Museu de la Musica de Barcelone, elle n’est plus jouable aujourd’hui, mais ceux qui l’entendirent reconnurent immédiatement le bien-fondé du travail de Torres. Les physiciens modernes aboutissent aux mêmes conclusions que lui, qui, quasi autodidacte, travaillait de manière intuitive. Il définit également le diapason (longueur de corde vibrante) idéal de la guitare : 65 cm. Mais chaque luthier apporte son lot d’évolutions et de perfectionnements. Par exemple, la lutherie de Werner Schär, descendant direct de Torrès, diffère en bien des points de celle du maître de San Sebastian de Almeria : outillage, procédés, avancée des connaissances, entrée en scène de l’informatique, inventions de barrages de plus en plus raffinés (voir article mon article "De l’or en barres", Guitare Live N° 22), tout cela confirme que l’évolution de la guitare, tout en restant fidèle à ses caractéristiques générales, est constante. Contrairement à certains instruments tels que le violon, dont les formes ont atteint une perfection inchangée depuis le milieu du 16ème siècle, la guitare ne cesse de se chercher de nouvelles formes. Mais lorsque de nouvelles familles apparaissent, elles ne supplantent jamais celles qui sont déjà en place. Notre instrument continuera donc d’évoluer ; chaque famille se développera, de nouvelles branches apparaîtront sans aucun doute (nous n’en connaissons probablement que les balbutiements ; j’utilise, par exemple, une guitare MIDI dépourvue de cordes, voir mon article "La Yamaha Ez-AG", Guitare Live N° 28), mais aucune de ces lignées n’écrasera l’autre. La technique de jeu évoluera avec les instruments, et les instruments évolueront avec les techniques de jeu. C’est le cas depuis toujours. Pour ne citer qu’un exemple, l’apparition de la guitare électrique a entraînée celle de techniques spécifiques, telle le Tapping cité plus haut, tandis que l’utilisation du "Golpe" (petit coup rythmique porté sur la caisse) en guitare flamenca a introduit tout un travail de renfort (Golpeador, protection en PVC ou, à l’origine, en bois dur ou en ivoire) et de préparation de la table. L’utilisation de la main sur une guitare MIDI est inédite, car il s’agit d’enfoncer des touches oblongues situées en lieu et place des cordes entre des frettes virtuelles (ce qui rend, actuellement, l’emploi de techniques telles le "pull off" impossible) : qui sait où vont mener ces développements ? J’en suis on ne peut plus friand et curieux. Et je vous invite à les suivre avec intérêt, en évitant soigneusement toute ankylose dans un quelconque ghetto ou une quelconque tour d’ivoire. Texte et photos : André Stern a.k.a. Amidala Articles connexes : |