Suivez-nous :

Guitare Live › Magazine › Guitare Live N° 37 › Roland Dyens et le luthier

Roland Dyens et le luthier

Roland Dyens et le luthier

Émouvante rencontre avec Roland Dyens, à l’occasion des concerts qu’il a donnés à l’Auditorium St. Germain de Poitiers. Et l’occasion de rendre visite au luthier Patrick Penaud, installé dans la région.
Par André Stern

Certains humains viennent au monde avec un don de magicien. Roland Dyens est l’un d’eux. Chacun de ses concerts commence par une improvisation, cela fait partie de ce qu’il appelle "ses superstitions" ; ainsi, il s’imprègne – et nous imprègne – de l’alchimie spécifique à la salle, au public, à son humeur du jour. Cela fait de chaque concert un moment particulier, hors du temps et des modes. Un moment magique. Dès les premières notes, il nous captive et nous fait oublier les vicissitudes du monde, les désagréments à l’accueil, l’inconfort de la salle bondée.

Il juxtapose une incroyable quantité de nuances et de sonorités, il explore mille voies, fait appel à toutes les techniques existantes, invente celles qui manquent ; et pourtant, jamais cela ne sonne comme le bric-à-brac disjoint que nous offrent à entendre la plupart des guitaristes qui s’essaient, habituellement, à ce jeu-là.

Il ne laisse jamais transparaître son incroyable maîtrise technique. On a l’impression que les notes coulent toutes seules, qu’il ne fait aucun effort. Et il cajole chaque son, chaque émergence de matière sonore.

Debussy voulait oublier que le piano a des marteaux. Roland Dyens réussit à nous faire oublier que la guitare est un instrument aux cordes pincées.

Ses compositions et ses arrangements, qui forment la majorité du programme auquel j’ai assisté, cisèlent les sonorités et, par-dessus tout, leurs unions, d’une manière qui me rappelle, justement, le travail de Debussy ou de Fauré.

Lorsqu’il se met à jouer du jazz, sa guitare devient orchestre, les strates sonores se superposent et s’allient pour former une musique multidimensionnelle tout à fait saisissante.

Et lorsqu’il joue du Villa Lobos, ce n’est, bien sûr, pas une œuvre pour guitare qu’il choisit, mais l’arrangement qu’il a fait de la Bachianas Brasileiras N°5, composée pour orchestre de violoncelles et voix de soprana. Un vrai miracle. On a beau le voir et l’entendre, on se demande comment il réussit, aussi magistralement, le difficile croisement entre les sons pizzicatos (étouffés par le gras de la main) et la mélodie aux notes vives et claires, tout en respectant les reliefs des violoncelles et de la voix…

 

Publié dans le magazine N° 37 de Mars 2008


Voir le magazine