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Guitare LiveMagazineGuitare Live N° 24Yann Tiersen, le retour aux sources

Yann Tiersen, le retour aux sources

Yann Tiersen, le retour aux sources

Loin de l’image « Amélie Poulain » que le grand public lui colle volontiers, Yann Tiersen vient de sortir un DVD atypique, où la caméra le suit durant sa tournée entre salles de concert et festivals en plein air. On y découvre de nombreux duos et surtout une facette plus rock, que le principal intéressé se voit prendre « sur plusieurs albums car je ne crois pas aux virages en épingles à cheveux »… Yann a la guitare qui le démange !
Propos recueillis par Nicolas Didier Barriac

« On Tour » est un DVD assez différent de ce qu’on trouve habituellement dans les bacs. Ici on ne visionne pas qu’un simple concert, c’est davantage un documentaire musical. Comment cette idée est-elle venue au départ ?
Yann Tiersen : L’idée vient surtout d’Aurélie Dubois qui a réalisé On Tour. Disons que nous nous étions concertés et qu’elle a décidé d’éliminer toute forme de contraintes dans ce projet. Nous nous sommes donc retrouvés à réaliser un patchwork de différents shows donnés ici et là. Pour moi c’est un moyen de retranscrire avec beaucoup plus de précision la réalité d’une tournée et de montrer davantage ce qu’il s’y passe, l’émotion qu’il y a sur scène, l’interaction avec le public, etc.

Du coup, le « personnage principal » de ce DVD est davantage le public que toi et tes musiciens sur scène…
Y.T. : Oui. C’est vraiment ça l’intérêt. L’objectif premier d’un DVD est qu’il soit regardable or quand on n’est pas dans la salle au moment du concert, ce n’est pas pareil. Il faut donc faire passer des émotions par d’autres moyens. Pour moi, The Last Waltz de Martin Scorsese y parvient incroyablement bien. Ca demande un travail créatif immense pour obtenir ce langage de l’image.

Est-ce que chaque concert de la tournée est représenté d’une manière ou d’une autre à travers On Tour ?
Y.T. : Non, car nous n’avions pas en permanence des cameramen. Un bon paquet de dates sont quand même représentées, même furtivement, par le biais des images. En revanche, les prises de son sont faites à partir d’un nombre réduit de concerts. Autrement, ç’aurait vite tourné à la cacophonie.

A travers les nouveaux titres que tu joues, on s’aperçoit que ton style prend à nouveau une tournure un peu plus rock. C’est un retour aux sources ?
Y.T. : Eh bien oui, c’est ça en fin de compte. J’ai joué beaucoup de rock dans mon adolescence et d’un seul coup j’ai eu besoin de me libérer de ça, car je me rendais compte que je copiais un peu trop mes influences. Je devais évoluer de manière différente pour remettre en cause mes fondements. Mais de mon point de vue, tout cela était très cohérent. Je n’ai jamais eu l’impression d’avoir de rupture dans ma discographie. C’est vrai que les guitares reviennent en force dernièrement. En plus la guitare est clairement l’instrument sur lequel j’ai le plus de facilité pour écrire les morceaux.

On sait que tu es multi-instrumentiste, la guitare est-elle aussi l’instrument dont tu te sens le plus proche ?
Y.T. : En ce moment, oui. Cela faisait longtemps que j’avais délaissé cet instrument et je le retrouve avec bonheur. Il n’y a pas 36 000 instruments pour écrire une chanson même si parfois une batterie faite avec un banjo et une mandoline peut donner naissance au Train (rires). Mais ça reste une exception, il n’y a quasiment que le piano et la guitare pour composer et j’ai toujours trouvé le piano plus compliqué. Je ne sais pas pourquoi, d’ailleurs. Peut-être est-ce dû au fait que j’ai appris le piano quand j’étais petit et que je me sens emprisonné dans des codes préétablis. A la guitare ou à la mandoline, je suis un parfait autodidacte, je ne sais jamais quelle note je joue sur ces instruments (rires). Je joue à l’instinct car je n’ai jamais pris de cours.

Pourquoi ?
Y.T. : Pour moi les instruments ne sont qu’un moyen d’écrire. Les cours, c’est bien si tu veux devenir meilleur que les autres en termes de technique. Or ce n’est pas du tout mon cas. En étant autodidacte et en découvrant par soi-même l’instrument, on ne se fixe aucune limite et on écrit ce que l’on ressent.

Tu n’as jamais de mal à retranscrire les chansons que tu entends dans ta tête à cause du manque de technique ?
Y.T. : Non, car je n’entends jamais rien dans ma tête ! Je ne fonctionne pas comme cela donc je n’ai jamais cette frustration d’avoir un truc en tête et de ne pas arriver à le jouer. Je me laisse toujours guider par le feeling du moment et je me ne sens pas bridé par le manque de technique.

C’est comme ça qu’on se retrouve à jouer de la guitare avec une perceuse…
Y.T. : Oui (rires). Alors ça, ça vient de Marco mon guitariste. Nous étions en répétition à Angers et tout d’un coup il a pris une perceuse pour m’accompagner pendant que je jouais un thème à la gratte. C’est venu totalement par hasard parce qu’il y avait une perceuse aux pieds de Marco à ce moment-là.

Selon les albums que tu sors, tu ne plais pas forcément au même public. Il y en a beaucoup qui ne digèrent pas lorsque tu donnes trop dans le rock…
Y.T. : (me coupant) Je crois qu’il y a vraiment eu l’effet Amélie Poulain, qui a fait venir un public qui n’était pas vraiment le mien et qui n’avait jamais écouté ma musique. Cela a pu créer un décalage mais sinon, je ne trouve pas que mon public change vraiment. Amélie a pu créer quelques malentendus mais globalement c’est un projet qui m’a servi énormément. Je ne le regrette en aucune façon. Mais, encore une fois, je n’ai pas l’impression d’être en rupture totale : je fais la même chose différemment.

Notre ami Sarkozy appellerait ça la Rupture Tranquille (rires). Sinon, pour finir, quelle est ta salle de concert fêtiche en France ou ailleurs ?
Y.T. : Il y en a plein comme Le Vauban à Brest ou l’Elysée Montmartre à Paris. Ce sont des endroits spéciaux pour moi.

Le site de Yann Tiersen (EMI) :
http://www.yanntiersen.com

Publié dans le magazine N° 24 de Janvier 2007


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