Porcupine Tree, la fabuleuse marche en avant
Fear Of A Blank Planet continue la fabuleuse marche en
avant de Porcupine Tree. Pour un groupe qui jouait encore dans des clubs
de quarante personnes dix ans après ses débuts, se retrouver
dans une Cigale sold out puis dans un Olympia quasi comble à cinq
mois d’intervalle est une belle consécration. A croire que
la formule metal marche mieux que la période pop rock. Steven Wilson,
tête à penser de l’arbre à porcs-épics,
revient avec nous sur la sortie de Nil Recurring, le petit frère
du dernier album, ainsi que sur quelques sujets essentiels…
Propos recueillis par Nicolas Didier Barriac
Question primordiale pour commencer cette entrevue : pourquoi
joues-tu toujours pieds nus sur scène ?
Steven Wilson : Ca remonte à mon enfance. J’ai toujours joué
comme cela. Je n’y ai jamais vraiment pensé en fait…
Quand j’étais petit, quand je m’amusais dans la rue
ou dans le bac à sable, j’étais très souvent
pieds nus. Du coup, je me sens mal à l’aise avec des chaussures !
Il n’y a donc pas de raison artistique derrière cet état
de fait (rires). Parfois les roadies me disent qu’il vaudrait mieux
que j’enfile quelque chose vu l’état de certaines scènes
mais je n’y arrive pas. Au mieux, j’enlève mes chaussures
au bout de deux chansons !
Vous sortez un EP, Nil Recurring, en février. Au départ,
il ne devait être disponible que par le biais de votre boutique
internet. Comment en êtes-vous venus à vouloir le distribuer
à plus grande échelle ?
S.W. : Nous avions quatre titres qui restaient des sessions de Fear
Of A Blank Planet. Nous savions qu’il s’agissait de bonnes
chansons mais qui malheureusement ne s’intégraient pas dans
le concept du disque. Nous voulions donc les rendre disponibles. Au départ,
nous pensions les mettre en téléchargement puis simplement
en édition limitée par notre boutique. Finalement, nous
avons opté pour une vraie distribution car nous étions contents
du résultat. C’est le compagnon idéal de Fear Of A
Blank Planet.
Il n’y a que cette histoire de non-compatibilité
avec le concept qui a empêché ces quatre titres d’être
inclus sur l’album ?
S.W. : Oui. Tout avait été écrit à l’époque
sauf What Happens Now qui n’existait qu’à l’état
de démo. Une bonne partie des pistes étaient même
finalisées à l’époque de Fear Of A Blank Planet
ce qui fait que potentiellement ce disque aurait pu les inclure. Néanmoins
je tenais à faire un album de moins d’une heure. Je n’aime
pas les CDs de quatre vingt minutes. La longueur idéale pour moi
se situe entre quarante et cinquante minutes comme au bon vieux temps.
Je sais bien que j’ai souvent sorti des albums plus longs que ça
mais par exemple avec Blackfield nous faisons très attention. Fear
Of A Blank Planet aurait été ennuyeux s’il durait
une heure vingt. Je pense donc que nous avons fait le bon choix.
Normal est un peu une version alternative de Sentimental. Etait-il
question à un moment donné d’inclure Normal sur Fear
Of A Blank Planet et de garder Sentimental pour Nil Recurring ?
S.W. : Non. Bien que pas mal de gens, même moi-même,
préfèrent Normal à Sentimental, l’album avait
besoin d’un morceau plus léger aux côtés de
gros pavés complexes. L’émotion est très forte
et différente de ce que propose le reste du disque. Là aussi,
à mon sens, c’était le meilleur choix artistique à
opérer.
Revenons sur deux titres plus anciens. Tout d’abord Feel
So Low. C’est un titre assez différent pour Porcupine Tree,
extrêmement simple et doté de paroles également très
naïves sur une rupture. Est-ce autobiographique ?
S.W. : (très mal à l’aise) Oui… Oui.
Cela t’a-t-il aidé ?
S.W. : Oui. Le fait d’exorciser des choses par le biais de
chansons est un des plus gros avantages d’être un artiste.
Il est donc tout à fait possible d’accepter ses émotions
négatives par ce processus créatif. Je me demande souvent
comment les gens qui n’ont aucune sensibilité artistique
arrivent à gérer ce genre de choses. Personnellement, dès
que je sens de la colère ou de la dépression arriver, j’écris
une chanson pour m’en libérer. Feel So Low est l’exemple
typique et effectivement il n’y a pas spécialement de métaphores…
L’autre est moins connu : Access Denied. Il s’agit
d’un titre de Recordings lui aussi assez différent de tout
ce que Porcupine Tree a fait, notamment avec la mélodie de piano
en intro. Que penses-tu de cette chanson ?
S.W. : J’adore ce titre ! Il me fait penser à du Velvet
Underground ou du XTC. Effectivement, je pense que ce ne sont pas des
sonorités que les gens associent facilement à Porcupine
Tree. Il y a des changements d’ambiance et d’harmonie assez
étranges sur ce titre mais il me semble que je l’aimais bien.
Pour être franc, je ne m’en rappelle pas très bien
– les paroles notamment – car nous ne l’avons jamais
joué sur scène mais j’en garde tout de même
un bon souvenir.
Tu es un multi-instrumentiste, principalement à l’aise
aux claviers et à la guitare. Est-ce que la guitare est l’instrument
duquel tu te sens le plus proche ?
S.W. : Bonne question. Je pense que les claviers et la guitare me
correspondent autant l’un que l’autre. Je joue mieux de la
guitare que du piano en tout cas, ce qui ne veut pas dire que je suis
un dieu de la six-cordes non plus. Mon instrument préféré
est sans doute le piano mais la guitare m’est nettement plus utile
pour écrire. J’ai tout de même écrire quelques-uns
de mes morceaux préférés comme Stop Swimming au piano.
Lazarus ou Sentimental aussi. Avec la guitare je tends à composer
des titres plus heavy, axés principalement sur les riffs. Open
Car est un bon exemple de ça.
Utilises-tu aussi la guitare acoustique pour composer ?
S.W. : Parfois. Je pense que ça s’entend assez facilement.
Trains, notamment, a été écrit à la guitare
sèche.
As-tu déjà écrit à partir d’un
autre instrument ?
S.W. : Oui. Une idée peut vraiment venir de n’importe
où. Une partie de batterie sur Start Of Something Beautiful ou
une ligne de basse sur Strip The Soul. Néanmoins les meilleurs
morceaux naissent toujours du piano ou de la guitare.
Il y a quelques années tu es passé chez Paul Reed
Smith. C’est l’influence de Mikael Akerfeldt d’Opeth ?
S.W. : En grande partie oui. En 2001, je jouais encore sur une Stratocaster
et nous allions nous engager dans notre période « metal »
et ma Strat ne me permettait d’obtenir les sons que je voulais.
J’avais une Les Paul également mais c’est un modèle
trop lourd pour moi. Lorsque j’ai produit Blackwater Park d’Opeth,
il m’a montré sa Paul Reed Smith et ça m’a convaincu
d’essayer.
Porcupine Tree – Fear Of A Blank Planet
Roadrunner – Warner
Et sortie de l’EP Nil Recurring chez Peaceville – Wagram le
18 février 2008
www.porcupinetree.com |